les ailes de l'ange(suite5)

 

« A quelle heure est votre avion ? »

« Vingt et une heure »

« Oh ! oh ! » L’intonation inquiète du chauffeur fit dire à Danoël :

« Ca ira, ne vous en faites pas. » Le chauffeur s’appelait  Raymond, marié à une conne, qu’il voulait quitter pour aller vivre avec une jolie poupée, qui avait moins de bouteille, ça l’ennuyait à cause de sa fille de cinq ans. Et tout une flopée de détails de sa vie était servis au grand rasta assis à l’arrière.

Danoël laissait courir le paysage nocturne parisien sous ses yeux. Le reflet de ceux ci dans la vitre de portier fixa son attention ; il venait de comprendre la raison principale de son voyage !

« Encore une fois je me suis fais avoir. »

« Ca t’arrivera encore. »

« C’est vrai, … mais… »

« Tu as envie de faire chier ? »

« C’est bon, on laisse faire… »

« Je préfère. »

« Il n’y a pas le choix de toute façon, si je ne la trouve pas, c’est que j’ai merdé. »

« Il y a peu de chance que ça t‘empêche de faire briller son diadème. »

« On en est à ce point ? ! »

« Tu en es à ce point. »

« Ca n’a pas marché deux fois, mec, juste deux fois. Elles n’ont pas voulu le faire. »

« Il n’y a pas de problème, je te l’ai dit déjà, ne t’en veux pas, tu as un peu omis des détails dans la procédure. Tu as oublié de me consulter mais c’est sans grande importance si tu l’avais fait, tu aurais su qu’il fallait d’abord accéder à leur désir avant d’ouvrir l’écrin et de faire briller leur diadème, elles auraient accepté…  ha ! ha ! ha ! »

« Deux, mec… deux ! » la déception devint visible dans  le regard qu’il se jetait à lui-même dans ce miroir au tain de décor nocturne parisien défilant de droite à gauche. Les yeux ne se perdaient cependant pas de vue, leur grisaille aux accents asiatiques se fixait elle-même, dans un trois quart intime et franc.

« Combien l’utilisent ensuite ? Jusqu’ici pas une sur quinze ! Le diadème, rien à foutre… on baise ? »

« Est-ce que tu peux faire autre chose ? »

« J’ai pas envie, mec, c’est comme si… »

« Comme si tu n’avais pas le choix. »

« Ouais, pas le choix, mais à quoi ça sert ? »

« Tu en souffres ? »

« Non, c’est génial ! »

« Laisse courir alors, peut-être que tu découvriras l’utilité sans la chercher.

« Hum… Mireille est très attachée à ce job… »

« Elle est la Kefa. »

« Arrête un peu tes conneries ! Kefa c’est quoi, bordel ! »

« Ouvre-toi à la sonorité, mon frère, écoute… Kefa… »

Danoël se souvenait avoir fermé les yeux à ce moment de cette discussion en lui-même et avoir répété ce mot qui pour lui n’avait aucun sens et qui pourtant revenait sans cesse dans le discours de cette voix en lui, une voix familière et amicale, toujours le rire au bord des phrases, une voix qui l’appelait « frère », et qu’il n’aurait pu confondre à aucun moment avec celle que nous percevons parfois lorsque nous nous parlons à nous même… Kefa… Kefa et soudain, émergeant de la mer tranquille de son monde intérieur…

« Elle est la nuit sur la neige des sommets…  à l’aplomb de la mâchoire vorace de la mal née… »

Puis la voix dans son cœur l’interrompit pour dire avec son accent rieur…

« Et toi, tu es la force qui empêche l’oisillon de se faire croquer.   Ha ! Ha ! Ha ! …  Piam !, c’est elle qui veille sur toi… idiot !    Ha ! Ha ! Ha ! … »

« C’est vrai, je serai dans une belle merde sans la petite grenouille ! »

A l’arrière du taxi qui l’amenait vers l’aéroport le jeune homme se mit à rire et a haute voix cette fois il corrigeait ses vers :

« Ha ! Ha ! … Elle est l’ombre sur la neige des sommets aux rayons regards de la lune ! … »

« Vous êtes un brin amoureux, vous ? Ca me rappelle mon frangin, c’était il y a un moment, on avait dix-huit, vingt piges, lui et moi et… » La machine à aligner les conneries était repartie au quart de tour ; il y était question d’un viol collectif sur la fiancée de son propre frère, pour démontrer à ce dernier que c’était une pute comme les autres, viol à la suite duquel son frérot fut bien obligé de se rendre à l’évidence, car les cinq qui avaient participé à la tournante durent se faire soigner.

« Elle lui disait qu’elle voulait se réserver pour la noce, n’empêche qu’on a tous chopé la chtouille ! »

Raymond, le rire risquant de l’étouffer, ou est-ce le silence de mort appuyé qui régnait à l’arrière de lui ? Toujours est-il qu’il cessa de rire, tout en jetant un coup d’œil inquiet dans le rétroviseur il ajoute comme une sentence

« C’est depuis c’temps là qu’mon frangin, il est dev’nu pédé. »

Danoël qui recevait la benne de détritus qui servait de souvenirs de jeunesse à Raymond se maudit de s’être laissé aller à déclamer à voix haute à l’intention de sa protectrice.

« On ne peut pas relâcher la bride à ce genre de bourrin ! » jura t’il dans le silence de son cœur. Puis il s’adressa au chauffeur redevenu silencieux :

« Inspecteur Li Yang, brigade des mœurs… il est chargé et prêt à t’envoyer un mollard d’acier brûlant dans l’cul ; la fille a déposé une plainte. Le genou du métis appuyait à l’arrière du dossier de Raymond, que la surprise secouait soudainement.

« Hé, c’est pas vrai ! C’est des conneries ! … »

« C’est là qu’il faut rire, foutu mytho. »

Cessant de rire Danoël se penchait entre les sièges avant du taxi.

« C’est loufem ce que l’on peut rencontrer comme branques qui s’raient en taule, si tout c’qu’ils font était zieuté par les lardus… »

Raymond, interloqué, allait, l’œil tourné à la niaiserie, demander au rasta d’éclairer son propos ; Danoël ne le laissa pas commencer sa phrase.

« Je connais dans ce bled là tout prêt de nous un type, qui loge chez lui une fille, et il la laisse se comporter avec sézigue comme si c’était sa meuf ! »

Le regard étonné dans le retro, le chauffeur répondait voyant que le rasta à l’arrière avait à priori finit de parler.

« Et alors ? » fit-il en ouvrant les mains sur le volant en signe d’interrogation.

« Et alors ! ? » aboya le métis en secouant exagérément la tête avant de poursuivre

« La fille en question a tout au plus dix ans ! »

« Et il couche avec ? ! s’indignait Raymond

« Il n’y a qu’un lit chez lui, j’vous fais pas un crobard, … , si ? » argua le jeune homme

« Et personne ne dit que dalle aux proxos des mœurs ? »

« Les voisins pensent que c’est le tuteur de la chiarde »

« Et l’identité chimique, alors ? »

« La p’tite est plus qu’un as de la truande ! Elle change d’empreinte plus souvent que de chaussures ! »

« Eh ! Ca, c’est des conneries, vous vous foutez de moi ! Tout le monde sait, que depuis l’I.C.P. la triche au blaze c’est de l’antiquité ! C’est pour ça qu’ils l’ont faite ! C’te foutue identité chimique … »

« C’est vrai seulement deux personnes savent dissoudre la puce organique une fois dans le corps. Un est clamsé l’autre est gardé au frais, … mais je vous dis que la môme a trouvé ! »

« Ca, je demande à voir ! » rétorqua le chauffeur, « vous tablez l’bordel si c’était vrai ? ! Le monde entier est fiché comme ça ! La police planétaire, c’te pute, identifie n’importe qui sans sortir son cul de ses bureaux ! La nationale a foutu tout l’reste au rencard depuis l’I.C.P. si c’était vrai c’que vous m’dites, alors la môme à du pognon à toute blinde ! Avec tous les gus qui voudraient s’faire oublier ! Pucés à la naissance, un vaccin et hop ! Le p’tit s’affiche à la PP ! »

« C’est vrai, mais la môme est plus occupée à planquer son passé qu’à faire du blé. »

« A dix piges ! … son passé ?! » Raymond voulait rire, Danoël poussa

« Elle a un passé plus lourd que vous et moi réunis, j’en suis sûr. »

Cette fois Raymond riait franchement.

« Vous écrivez pour le cinoche, c’est ça ? »

« C’est la fille de feu Briders »

« Briders… l’inventeur de … »

« L’I.C.P. »

« Il est mort quand sa baraque a pété, il y a deux ans, c’est ça ? » Danoël le laissa continuer … « Oui, c’était y a deux ans, on croyait à l’attentat et les flics ont dit qu’c’était un accident de labo, une fuite de ce gaz nouveau… On a retrouvé si peu de barbaque de lui et sa femme que ça tenait dans une boite de cachou ! Ca a foutu un coup à ma rombière à cause de la p’tite… Oui, ça j’m’en souviens … Mireille Briders, c’est ça ? Vaporisée qu’ils disaient, mais ils l’ont porté disparue. »

« Elle est vivante, monsieur ! »

« J’vous crois pas, arrêtez ! J’vous crois pas ! »

« Pourquoi je vous raconterai ça, alors ? »

« Ben, à cause de l’histoire de mon frangin et sa fiancée ! »

« Je n’aime pas le mensonge, même pour faire passer le temps. »

« J’m’excuse, m’sieur, j’aime bien en rajouter, c’est sûr, j’y vois pas d’mal… » puis Raymond bondit dans le ton : « Mais vous, alors, quelle imagination ! »

Raymond riait à nouveau. Danoël se calait dans le siège arrière, il riait, lui aussi, en pensant qu’il n’y avait rien de tel que de dire la vérité pour n’être pas cru.

 

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